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intifada - Page 5

  • Assemblée générale UJFP 2022.

     

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    Texte d’orientation politique pour 2022 de l’UJFP, issu de l’Assemblée générale

    L’actualité immédiate est marquée sur le plan international par la guerre menée par le dictateur Vladimir Poutine contre le peuple ukrainien. Cependant bien d’autres chefs d’États ont affiché ces dernières années une brutalité décomplexée. Dans le cadre de l’OTAN, les États-Unis poursuivent leur politique impérialiste tout autant belliqueuse et meurtrière. Dans un tel contexte, les idées racistes et suprématistes progressent partout dans le monde et ici-même en France les migrants, exilés, sans-droits subissent une inhumanité accrue.

    Les deux pôles d’activités que sont le soutien à la Palestine et la lutte antiraciste sont le cœur de l’engagement de l’UJFP.

    SUR LA PALESTINE :

    Forts du soutien de leurs alliés occidentaux et de l’aveuglement des dictatures arabes ayant renforcé les liens avec Israël, les dirigeants autoproclamés de « l’État Nation du Peuple Juif » avec pour capitale Jérusalem ne se donnent plus la peine de dissimuler leur entente avec d’authentiques fascistes, et même souvent antisémites comme c’est le cas en Europe. Une violence coloniale sans limites s’est accentuée à l’encontre des Palestiniens : emprisonnement et expulsions de simples citoyens ou responsables politiques, vol des terres, colonisation, épuration ethnique, accentuation du blocus de Gaza où les bombardements tuent ou mutilent les populations civiles… Le silence des médias et des responsables politiques occidentaux sur la gravité de ces atteintes au droit international s’accompagne d’un contrôle accru des réseaux sociaux où s’exprime un important courant de sympathie populaire en faveur du peuple palestinien, une solidarité qu’on cherche à étouffer. La récente dissolution du Collectif Palestine Vaincra qui a d’ailleurs occupé une partie de nos débats, révèle que dans un contexte de solidarité anti-guerre en faveur de l’Ukraine, solidarité largement médiatisée alors qu’elle fut toujours refusée aux Palestiniens, le pouvoir en France s’en prend ouvertement à la liberté d’expression et d’association, s’aligne par les propos de son premier ministre au dîner du CRIF sur la politique d’annexion imposée impunément par Israël, au mépris même des engagements de la France à respecter le droit international.

    En dépit de ce contexte difficile pour le mouvement de solidarité avec la Palestine, l’évolution récente ne nous permet pas de céder au pessimisme. L’accueil de deux intervenants issus de la jeune société civile palestinienne chargés d’animer un premier atelier, Majd Kayyal d’une part, journaliste et écrivain de Haïfa, et Inès Abdel Razek d’autre part, directrice du plaidoyer pour le Palestine Institute for Public Diplomacy et membre du think tank Al Shabaka, a permis d’affiner notre perception de la situation nouvelle qui se présente et d’en tirer les leçons pour nos actions à venir. Il ressort des débats :

    – Tout d’abord, l’aspiration à l’unité nationale palestinienne s’est révélée fortement à l’occasion de la dernière agression israélienne contre Gaza en mai dernier. Les anciens schémas politiques ont éclaté et nécessitent de prendre des distances avec les organisations politiques officielles. L’UJFP affirme son soutien à la société civile palestinienne prise dans sa diversité et sur l’ensemble du territoire mandataire, en incluant bien sûr les Palestiniens réfugiés et exilés.

    – À côté de nos actions pour l’autonomie alimentaire à Gaza et de nos engagements à faire connaître via Gaza Stories la vitalité de cette société sous blocus, objectifs que nous poursuivrons, nous veillerons  à soutenir au moins un projet parmi les coopératives et associations qui se développent en Cisjordanie et en Palestine de 48. L’UJFP s’engagera dans de nouvelles initiatives, sachant qu’il est aussi de notre devoir de soutenir plus activement au moins une des six ONG interdites en Palestine. La solidarité avec la Palestine passe également par notre soutien aux anticolonialistes israéliens, d’autant qu’ils restent isolés et que leur courage est exemplaire.

    – La publication récente du rapport d’Amnesty International sur l’apartheid israélien constitue une avancée essentielle dans la bataille que nous menons avec nos alliés pour obtenir enfin des sanctions contre Israël, une bataille qui, il faut l’espérer, sera également portée devant la CPI (Cour pénale internationale) pour que soient enfin jugés les crimes de guerre commis contre les Palestiniens. L’UJFP, qui a inscrit l’antisionisme dans sa charte, utilisera les rapports dénonçant l’apartheid israélien pour construire des projets d’intervention sur cette question et faire comprendre le lien étroit qui existe entre l’apartheid israélien et l’idéologie sioniste qui anime cette politique.

    – L’UJFP devra également poursuivre son implication dans le cadre de l’initiative citoyenne européenne (ICE) pour mettre fin au commerce avec les colonies dans les territoires occupés, campagne relayée en France par la Plateforme des ONG pour la Palestine et en Europe par ECCP (European Coordination of Committees and Associations for Palestine) afin d’atteindre le million de signatures avant le 20 février 2023.

    – En raison de la persistance d’un sionisme de centre-gauche devenu obsolète, il convient en tant qu’UJFP de mobiliser le mouvement de solidarité et les partis politiques pour faire pression sur le gouvernement et participer aux collectifs locaux qui démarcheront auprès des candidats aux prochaines législatives. L’UJFP engagera le dialogue pour faire progresser les partis de gauche qui sont encore sur des positions naïves, Inès Abdel Razek ayant évoqué les exemples encourageants de la récente évolution aux États-Unis où les citoyens états-uniens commencent à contester le soutien à Israël, y compris parmi les Juifs, ce qui ne se voit pas en France.

    – Nous continuerons à nous impliquer dans les différents collectifs existants de défense des droits des Palestiniens, qu’il s’agisse de la Plateforme des ONG pour la Palestine, du Collectif National, d’ECCP, d’EJJP, du Collectif juif international pour la justice en Palestine, sans oublier le Collectif pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah…

    – Notre implication dans la campagne BDS France reste essentielle là où existent des comités qui relaient les actions préconisées par le BNC palestinien. Il en est de même avec l’AFPS qui compte parmi ses militants des membres de l’UJFP qui y sont actifs et il serait bienvenu d’engager avec l’AFPS des micros-projets sociaux, sachant que l’année écoulée a été marquée par le succès de Gaza balle au pied à l’occasion de la tournée des footballeurs handicapés de Gaza, un événement organisé conjointement par nos deux associations.     

    – Dans le cadre du groupe de travail inter-associations, nous poursuivrons le travail systématique d’analyse des livres scolaires et des autres documents en direction des jeunes sur la question de la Palestine.

    SUR LA LUTTE CONTRE LE RACISME :

    Dans un contexte où le racisme d’État n’a jamais été aussi évident et où l’islamophobie a conduit aux dissolutions d’organisations de défense des musulmans dont le CCIF, notre partenaire dans la plateforme antiraciste, et alors que les médias auront largement contribué à la fascisation du débat public et révélé leur complaisance à l’égard d’une extrême droite décomplexée aux portes du pouvoir, le camp antiraciste, affaibli et divisé, subit les calomnies et les violences policières. Malgré tout, l’antiracisme décolonial a gagné la bataille culturelle, raison pour laquelle le pouvoir s’attaque à l’université et ne peut enrayer la solidarité qui s’organise avec succès autour des migrants et des sans-papiers, contre les violences policières et la menace de l’extrême-droite, motif de l’importante mobilisation qui s’est déroulée le jour même de notre assemblée générale.

    L’UJFP rappelle son engagement contre le racisme sous toutes ses formes et dénonce la montée des discours et des actes racistes dont ceux qui relèvent de l’antisémitisme. Les récentes polémiques reprochant à la gauche, sans argumentation sérieuse, de ne pas en faire assez sur cette question et visant plus particulièrement notre organisation, nous ont conduits à tenir un atelier de réflexion sur notre conception de la lutte contre l’antisémitisme dans le cadre de la lutte contre le racisme d’État :

    Nous réaffirmons avec force la nécessité de mener la lutte contre l’antisémitisme, mais de la mener en l’autonomisant de toute pression étatique, communautaire ou sioniste.

    Nous nous engageons à continuer de déconstruire l’amalgame qui conduit à assimiler l’antisémitisme à l’antisionisme, amalgame que l’on trouve notamment dans l’instrumentalisation de la définition de l’IHRA. Ces deux notions sont à distinguer d’autant que la confusion entretenue n’a pas d’autre but que de criminaliser toute critique d’Israël. La publication à venir de notre livre L’antisionisme, une histoire juive, sera un des éléments de notre réponse à cette mystification et nous aurons à la faire connaître.

    – L’UJFP doit approfondir ses analyses sur les causes de l’antisémitisme en France, son instrumentalisation et les moyens de lutter contre. C’est avant tout un travail pédagogique qui touche à la façon dont le racisme est abordé dans les manuels scolaires, notamment d’éducation civique. Notre précédent ouvrage Une parole juive contre le racisme reste un outil essentiel pour dégager la jeunesse du piège du racisme et l’orienter vers un travail politique et citoyen permettant de dépasser les réactions purement émotionnelles et les tensions intercommunautaires.

    – L’UJFP va poursuivre ses initiatives de communication dans les médias alternatifs et les réseaux sociaux.

    – Il est décidé de contacter toutes les associations, partis et syndicats partenaires de l’UJFP afin de discuter avec eux des enjeux posés par ces questions et de notre positionnement sur le racisme.

    – L’UJFP continuera de lutter contre toutes les formes de racisme : islamophobie, négrophobie, judéophobie, aux côtés des Rroms, des Asiatiques, des migrants ou exilés… Ce combat exige que nous participions à la reconstruction d’un espace antiraciste politique où nous aurons notre place en tant qu’organisation portant une parole juive. Notre organisation devra aussi s’investir davantage dans les initiatives prises par la Marche des Solidarités qui implique le soutien aux migrants, sans-papiers et victimes de violences policières. L’UJFP continuera également de participer aux travaux du CRID et aux Universités d’été des mouvements sociaux.

    – Enfin, les récents événements nous invitent à relancer la lutte contre l’impérialisme et de la réintégrer dans notre champ d’intervention, même si elle n’a jamais été étrangère à nos combats. De plus, Notre engagement pour les droits du peuple palestinien et comme notre engagement contre le racisme nous conduisent à être partie prenante de mobilisations plus larges pour la défense des droits et libertés, et pour la recherche d’alternatives aux situations que nous dénonçons.

    La Coordination nationale de l’UJFP, le 24 avril 2022

  • La critique comme construction d’un mouvement : les rapports sur l’apartheid en Palestine

     

     

    12 avril 2022

     

    Par Tareq Baconi, 29 mars 2022 

    Nous devons commencer par ce que la plupart des Palestiniens considèrent comme des vérités incontournables. Le sionisme est un mouvement colonial de peuplement déterminé au mieux à nous effacer, au pire à nous éliminer. C’est une idéologie raciste enracinée dans la croyance de la suprématie juive en Palestine. Toute la Palestine est palestinienne ; c’est une unité unique, indivisible, malgré la colonie de peuplement israélienne qui a été normalisée dans ce pays. Le Nord global, mené par les Etats-Unis et les Etats membres européens, est biaisé en faveur d’Israël et rapide à diaboliser les Palestiniens qui rappellent ces faits. Il s’ensuit que les médias occidentaux ont pour la plupart ridiculisé, sous-représenté et/ou ignoré les voix palestiniennes en faveur des analystes israéliens ou occidentaux, à qui ils accordent plus de crédibilité qu’à l’expérience vécue des Palestiniens pour forger des récits et décrire les réalités sur le terrain. Et, enfin, le droit international et le système juridique international sont façonnés par le puissant, appliqués de manière hypocrite et ils nous ont largement laissé tomber. Pourtant, en grande partie, les Palestiniens continuent à s’y accorcher, en tant qu’outil pour notre libération à venir. 

    Ce sont les données. C’est à l’intérieur de ce contexte que, en 2021, des organisations israéliennes et internationales ont commencé à publier des rapports accusant Israël du crime d’apartheid contre le peuple palestinien. Après des décennies de travail inlassable de Palestiniens pour mettre en avant l’accusation qu’Israël pratique l’apartheid, les dominants rattrapent enfin leur retard. En janvier 2021, B’Tselem, l’organisation principale de défense des droits humains d’Israël, a publié un rapport intitulé sans ambiguité Un régime de suprématie juive du Jourdain à la Méditerranée : c’est un apartheid. Trois mois plus tard, Human Rights Watch, la principale organisation internationale de défense des droits humains, a fait écho à ces conclusions en publiant un rapport exhaustif, incluant une analyse juridique étendue et qui a conclu de manière accablante que les autorités israéliennes commettent des crimes contre l’humanité, sous la forme d’un apartheid et de la persécution du peuple palestinien. Un an plus tard, en janvier 2022, Amnesty International, une organisation qui a plus de dix millions de membres dans le monde entier, a publié un rapport intitulé Apartheid d’Israël contre les Palestiniens : un système cruel de domination et un crime contre l’humanité.

    Etant donné le racisme latent qui façonne l’ordre du monde — actuellement très manifeste dans la couverture de l’invasion russe en Ukraine comparée avec celle des interventions armées occidentales passées et en cours dans le Sud global — ces rapports ont reçu plus d’attention que deux décennies de plaidoyer palestinien sur cette question. C’est, à juste titre, un désappointement et un rappel douloureux de la hiérarchie des narratifs globalement — quels narratifs sont estimés dignes d’attention et quels autres rejetés — et c’est une hypocrisie sur laquelle beaucoup de Palestiniens se fixent. Pourtant ce n’est pas une surprise ; si les Palestiniens n’étaient pas déshumanisés sur la scène mondiale, nous ne serions pas en train de lutter pour notre survie. Cet effacement est, après tout, précisément la réalité que nous travaillons à changer.

    Ce n’est pas une surprise, non plus, que ces organisations proposent des rapports qui sont imparfaits et qui, à différents degrés, vont moins loin que ce que les Palestiniens ont défendu depuis longtemps. Le rapport de B’Tselem, par exemple, ne fait aucune mention des réfugiés palestiniens, tandis que le rapport de Human Rights Watch suggère que l’apartheid israélien s’est manifesté après qu’un « seuil » a été franchi pendant les années du gouvernement de Trump, et non en 1948, à l’instant même de la création d’Israël. Le rapport d’Amnesty, en comparaison, enracine son analyse en 1948 et appelle au retour des réfugiés palestiniens comme un élément critique pour la décomposition du régime [d’apartheid] d’Israël. Il s’abstient, néanmoins, en tant qu’organisation de défense des droits humains, de prendre position sur l’auto-détermination et la souveraineté palestiniennes, qu’il voit comme des décisions politiques.

    Différents universitaires et analystes palestiniens ont critiqué ces rapports et expliqué leurs perspectives sur des plateformes palestiniennes. Le principal point de discorde est que, en employant un cadre de droits humains et de droit international, les rapports minimisent la nature coloniale de peuplement du régime d’apartheid d’Israël et son intention de domination raciale. Dans ce cadrage libéral de l’apartheid, il s’ensuit que la résolution de la lutte palestinienne serait la démocratisation et l’égalité offerte à tous les citoyens à l’intérieur du dit régime, plutôt que le complet démantèlement, ou décolonisation, du système d’apartheid. Dans des termes simplifiés, ce serait la différence entre le modèle colonial de peuplement américain où les habitants autochtones et les Afro-Américains atteignent l’égalité dans les plis de la suprématie blanche, versus le modèle sud-africain qui est une lutte continue pour démanteler l’apartheid. Ce mois-ci, le Rapporteur spécial des Nations Unies Michael Lynk a explicitement attribué l’apartheid d’Israël au colonialisme de peuplement, en limitant cependant son analyse à la Cisjordanie plutôt qu’à l’intégralité du régime du fleuve à la mer. 

    L’insistance palestinienne à mettre au centre le colonialisme de peuplement et la domination raciale pour comprendre l’apartheid est justifié, crucial et historiquement exact. L’apartheid, après tout, ne peut être séparé du colonialisme de peuplement : il n’y a pas d’exemple d’apartheid qui ne soit enraciné dans un colonialisme de peuplement. Même si ces organisations, sciemment ou non, enveloppent d’une teinture libérale l’accusation d’apartheid, ou si nos détracteurs l’utilisent pour désigner une chose particulière, ce ne peut être passé sous silence : l’apartheid est le colonialisme de peuplement et dans le cas de la Palestine l’apartheid est le sionisme. Les efforts pour minimiser la nature coloniale de ce régime prêtent à confusion, sont inexacts et constituent des omissions flagrantes qui ne peuvent être ignorées ; ce sont des questions de vie ou de mort. Ces rapports montrent, une fois encore, les limitations des cadres des droits humains et du droit international quand il s’agit des peuples colonisés.

    Pourtant, eux aussi sont des données ; en tant que Palestiniens, nous avons appris que le droit international n’est pas le lieu de notre libération. C’est tout au plus un outil dans une lutte qui se déroule dans d’autres arènes : politique, économique, militaire. Il ne peut y avoir aucun espoir que notre libération soit apportée sur les ailes des rapports d’organisations israéliennes ou internationales. Un tel espoir ne repose sur rien d’autre que la naïveté et une mauvaise compréhension de la manière dont le pouvoir et la politique marchent.

    En réagissant à ces rapports, nous avons raison de ré-établir, de ré-itérer, de re-confirmer le narratif palestinien et d’expliciter, encore et encore, nos lignes rouges en tant que peuple. Nous avons raison de demander plus, et mieux, de nos alliés. C’est un élément central dans la réaffirmation de notre identité collective, et en tant qu’exercice, cette critique est cruciale pour construire et continuer à faire pression pour qu’un narratif palestinien unifié prévale.

     Cette sorte de correction est particulièrement essentielle étant donné notre histoire, où une génération entière a été élevée dans un discours prêtant à confusion et focalisé sur la partition et la construction de l’Etat, et non sur la décolonisation. De ce point de vue, ces critiques sont cruciales en ce qu’elles font deux distinctions importantes. La première est que la liberté pour les Palestiniens signifie être libérés de la domination, en d’autres termes, la souveraineté et l’auto-détermination — pas l’inclusion dans le régime d’apartheid comme citoyens israéliens. Deuxièmement, ces critiques réaffirment la qualité de peuple pour les Palestiniens — en y comprenant toutes ses composantes. Au-delà de la Palestine, ces critiques sont cruciales pour nous aider en tant que Palestiniens, et aider globalement nos alliés, à imaginer ce à quoi la décolonisation peut ressembler en pratique au XXIe siècle. 

    Notre travail ne doit pas s’arrêter là, cependant, et ces critiques ne doivent pas éclipser le développement critique que l’intégration de l’accusation d’apartheid dans le discours dominant porte avec elle. Si nous arrivons à comprendre ces rapports comme de simples outils, pas comme le lieu de notre libération et si nous reconnaissons le pouvoir biaisé des médias israéliens et internationaux qui portent plus de poids que les voix palestiniennes, alors le moment est imprégné d’un potentiel politique. Avec ces organisations israéliennes et internationales majeures venant sur le devant de la scène et avançant lentement vers le narratif palestinien, un tournant se produit, que nous devons encourager, sur lequel nous devons capitaliser et construire. Ces rapports ont la capacité de changer le narratif autour de la Palestine dans l’imagination du grand public, de passer d’un narratif focalisé sur un conflit entre deux parties en guerre et sur un processus de paix défectueux à un narratif d’apartheid. Un tel changement de paradigme est essentiel et c’est un prérequis pour notre future libération. La bataille se déroule en ce moment et nous ne devons pas nous embourber à saper ces rapports, ratant ainsi la forêt pour les arbres.

    En construisant là-dessus, nous, Palestiniens, devons nous saisir de ces rapports et enclencher un effet boule de neige, où cette accusation [d’apartheid] est mise en avant, imposée dans chaque canal médiatique, dans chaque conversation sur la Palestine, dans chaque rencontre avec des décideurs politiques et dans chaque campagne contre les soutiens d’Israël, compagnies ou gouvernements. L’association d’Israël avec l’apartheid doit devenir intuitive pour tout spectateur, toute spectatrice, qu’ils soient ou non investis dans la lutte pour la justice en Palestine. Indépendamment des biais que nous trouvons dans ces rapports, en même temps que nous les critiquons nous devons aussi les mobiliser, les réclamer et les reconstituer pour travailler en notre faveur. Un tel exercice nous remplirait-il de ressentiment parce qu’il a fallu qu’une entité internationale ou israélienne dise quelque chose pour que cette chose soit acceptée comme vraie ? Peut-être. Mais cela pourrait également nous remplir de motivation et d’énergie pour que nous changions enfin le paysage médiatique en notre faveur, après des années de notre propre mobilisation infatigable. Est-ce que notre histoire, de toute façon, nous a pas conduits à n’attendre rien que du racisme, particulièrement du monde occidental ? C’est le sale jeu de la politique que nous devons jouer afin d’aller plus loin dans notre lutte et de garantir notre liberté. Nous devons utiliser ces rapports pour faire pression sur ces organisations, et d’autres, et travailler avec elles, les rapprocher de notre narratif. En faisant cela, nous devons étendre notre mouvement pour inclure des alliés qui ne sont peut-être pas où nous voulons qu’ils soient, mais qui sont néanmoins sur une trajectoire dans la bonne direction.

     Tout cela doit être fait sans compromis sur nos lignes rouges. C’est le faux pas de nos anciens. Ils ont accepté des compromis sur le thawabet palestinienen acceptant la partition, qui est le socle de l’apartheid, au nom d’un engagement politique et diplomatique. C’était une erreur qui ne doit pas être répétée. Jouer la politique ne devrait pas impliquer de concessions sur les principes fondamentaux, sinon la bataille est perdue d’entrée. C’est là où la critique est essentielle si elle est faite avec l’objectif de bâtir un mouvement, de garantir un pouvoir, de construire plutôt que de détruire. Les critiques devraient se demander : comment pouvons-nous utiliser ces interventions, et construire un pouvoir — les utiliser à notre avantage, aussi incomplets soient-ils ? Nous pouvons, paradoxalement, mettre en lumière les lacunes de ces rapports, tout en nouant un dialogue avec leurs points forts pour avancer notre propre narratif. Une telle pratique de l’engagement critique est cruciale pour construire un mouvement politiquement et intellectuellement élaboré, et elle doit être un constituant fondamental de notre politique, particulièrement parce que notre leadership politique est immobilisé et compromis. 

    De telles pratiques nous permettent de réclamer notre pouvoir d’action, de sorte que nous, en tant que Palestiniens, définissions quelles sont nos lignes de bataille. Entrer dans le jeu politique devient non une concession, mais une source de force, lorsque nous mobilisons les outils disponibles à notre avantage. Aussi longtemps que nous, Palestiniens, comprenons ce qu’est notre lutte pour la libération — démanteler le régime sioniste colonial de peuplement et obtenir l’auto-détermination en Palestine — alors cela doit être notre lumière directrice. Aussi longtemps que les valeurs animant notre mouvement — liberté, justice, égalité — sont au premier rang de notre engagement politique, alors nous ne ferons pas de faux pas, même si nous utilisons les outils compromis des droits humains et du droit international.

    Trad. CG pour l’Agence Media Palestine

    Article originel en a

  • Le rapporteur des nations unis ...

    Le Rapporteur spécial des Nations Unies confirme qu’Israël pratique l’apartheid contre les Palestiniens 

     

     

    08/04/2022

    Accroissons la pression pour que la communauté internationale et les Nations Unies appliquent leurs obligations juridiques et mettent fin à l’apartheid israélien.

    Le Comité national palestinien du BDS, la plus importante coalition de la société palestinienne, salue les conclusions du dernier rapport du professeur Michael Lynk, Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés, qui affirme qu’Israël pratique l’apartheid contre les Palestiniens. 

    Le rapport du Rapporteur spécial met en lumière le consensus international croissant selon lequel le régime d’oppression exercé depuis des décennies par Israël envers les Palestiniens autochtones comporte le crime contre l’humanité d’apartheid, et demande aux États de réagir en élaborant une liste diplomatique de mesures visant à ce qu’Israël rende compte de ses actes.

    Au début de cette année, un rapport détaillé d’Amnesty International concluait qu’Israël avait exercé depuis sa fondation en 1948 un régime d’apartheid contre l’ensemble du peuple palestinien, et demandait que des mesures effectives soient prises au plan international pour que des comptes soient rendus et que ce régime soit démantelé.

    L’apartheid est finalement devenu un cadre de référence inévitable pour examiner le rejet systémique par Israël des droits des Palestiniens. L’an dernier, des études menées par Human Rights Watchet par B’Tselem, la plus grande organisation israélienne de défense des droits humains, ont confirmé ce que disaient depuis des décennies les défenseurs des droits humains palestiniens, sud-africains et internationaux : Israël est un État d’apartheid.

    L’initiative citoyenne européenne pour mettre fin au commerce avec les colonies illégalement établies dans les territoires occupés est une mesure efficace dont l’Union européenne et ses États membres doivent tenir compte, en tant que première étape pour mettre fin à leur complicité honteuse avec l’entreprise israélienne d’établissement de colonies, assimilable à un crime de guerre aux termes du droit international. D’autres États sont également tenus, au regard du droit, aux obligations de mettre fin à toutes les formes de soutien au régime d’apartheid d’Israël et de s’associer aux mesures visant à mettre fin à ce régime.

    Le rapport du professeur Lynk recommande la réactivation du Comité spécial de l’ONU contre l’apartheid, préconisation largement soutenue par la société civile palestinienne ainsi que par des personnalités internationales de haut niveau, en particulier dans le Sud global, qui font pression pour que l’ONU enquête sur l’apartheid #UNInvestigateApartheid.

    L’ONU,  sous l’hégémonie étasunienne et européenne, a été directement responsable en 1947-48 de l’aide à l’établissement d’un régime de colonialisme de peuplement sioniste et d’apartheid au moyen du nettoyage ethnique d’une majorité de Palestiniens autochtones. Juridiquement et moralement, l’ONU est donc dans l’obligation d’assumer la responsabilité de démanteler l’apartheid #DismantleApartheid dans la Palestine historique, comme elle l’a fait en Afrique du Sud il y a de nombreuses années. Il est grand temps que l’ONU fasse de l’apartheid une histoire ancienne.

    Source : BDS Movement Traduit par : SM